Photo : Léa Lemieux - Marta Alicia Socop Cuscun vient travailler au Québec depuis trois étés.

Le sourire aux champs de Marta

Les champs agricoles sont dominés par les travailleurs étrangers masculins depuis des années, mais rien n’empêche certaines femmes de s’y plaire.

L’Éveil agricole est allé à la rencontre de Marta, travailleuse agricole à la Ferme Forget, à Laval, dont le sourire semble illuminer les champs.

Marta Alicia Socop Cuscun travaille à la Ferme Forget pendant la saison estivale depuis 2023. Elle a entamé son aventure à la ferme en occupant des fonctions de cuisinière, programme des travailleurs étrangers temporaires oblige. Depuis, Marta a été mutée aux champs, où elle sème, récolte ou désherbe avec ses quatre collègues, aussi des travailleurs étrangers.

« J’aime ça cueillir des fraises, travailler les tomates, les poivrons, tout ce qu’il y a ici. C’est ma passion. » Le travail ne manque pas : la ferme de Mathieu Forget cultive une grande variété de légumes et de petits fruits dans ses champs et dans ses serres.

Avant de venir au Québec l’été, Marta travaillait aussi dans l’agriculture au Guatemala, son pays d’origine. Veuve et mère de deux garçons de 11 et 13 ans, Marta s’exile au Québec en été afin de subvenir aux besoins de sa famille, à l’instar de nombreux travailleurs étrangers. « Je suis à la fois papa et maman. C’est le double de travail. Alors, les besoins nous obligent à venir ici », illustre-t-elle.

La famille n’appuie pas toujours facilement un tel choix, soutient Marta. « Je pense que la famille ne soutient pas vraiment [notre décision] parce qu’elle nous dit “Et tes enfants, alors ?” Mais, en tant que mère, je dois voir la nécessité en face », détaille la Guatémaltèque.

« Au Guatemala, il y a du travail, mais le salaire est petit. C’est à peine suffisant et les besoins sont grands. C’est seulement ici que nous venons nous battre, en tant que travailleurs temporaires, pour faire avancer nos enfants en leur offrant un meilleur avenir », explique Marta. Être séparée de ses enfants près de cinq mois par année est un peu devenu une habitude. « C’est un peu triste, mais je fais ça par amour pour eux », souligne-t-elle.

Seule femme dans l’équipe

Marta travaille dans une équipe composée de deux autres Guatémaltèques et de deux Mexicains. Ponctuels, souriants, avenants, fiables : Rebecca Lamontagne, adjointe aux opérations de la Ferme Forget, ne tarit pas d’éloges face à ses travailleurs. « Le plus le fun, c’est vraiment leur attitude. Quelqu’un qui a hâte de venir travailler le matin, je ne retrouve pas ça nulle part ailleurs », témoigne Mme Lamontagne.

Être la seule femme du groupe ne dérange pas du tout Marta. « J’ai l’impression qu’ils sont mes frères. Ils me respectent, je les respecte. On travaille comme une famille, il n’y a aucun problème », avance-t-elle.

En agriculture, plus rares sont les producteurs qui choisissent des travailleuses étrangères temporaires. Lorsque les entreprises agricoles font leurs demandes auprès des programmes gouvernementaux afin de recevoir des travailleurs étrangers, elles ont le choix d’accueillir seulement des hommes, des femmes ou les deux.

En 2019, il y avait 1625 femmes sur 23 300 travailleurs étrangers temporaires, selon le Portrait des travailleuses immigrantes de la Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité du travail (CNESST). « Ce n’est pas encore la tendance de dire qu’on va demander des femmes [pour le travail agricole]. Pourtant, je pense que les femmes feraient le travail autant que les hommes », affirme Ingrid Francoeur, directrice du Centre d’emploi agricole de l’Union des producteurs agricoles Outaouais-Laurentides.

« C’est sûr que les sacrifices sont beaucoup plus grands pour les femmes, elles ont souvent des enfants. Il y a ça aussi qui joue dans la balance », justifie Mme Francoeur.

Chose certaine, l’enthousiasme de Marta est débordant, elle qui n’hésite à lancer quelques blagues pendant sa rencontre avec l’Éveil agricole. « Je suis très heureuse ici, c’est un beau pays », répète-t-elle.

 

Léa Lemieux
llemieux@groupejcl.ca

Commentaires