"The First Thanksgiving at Plymouth" (1914) par Jennie A. Brownscombe. Domaine public.

L’Action de grâce, une fête des récoltes parmi tant d’autres

Octobre est le mois de l’Action de grâce au Canada.

Célébrée depuis 1957 au pays de la feuille d’érable lors du deuxième lundi du 10e mois de l’année, l’origine de l’Action de grâce, une fête qui souligne la fin des récoltes agricoles, tire ses racines d’un passé très lointain.

Depuis que les sociétés se sont sédentarisées et ont adopté l’agriculture comme mode de survie alimentaire, des rites et des célébrations religieuses rendant grâce et remerciant la terre pour ses fruits ont pu être observés. En effet, des fêtes de la moisson ou des fêtes de la récolte avaient lieu sur tous les continents comportant des populations agraires.

De la Kronia à la Saint-Martin

Dans l’Athènes antique, on célébrait la Kronia, un festival soulignant les premières récoltes de l’été. La Kronia fut nommée d’après Chronos, un titan dont l’attribut principal était la faux, outil destiné à faucher les céréales, mais qui servi à Chronos à couper le sexe de son père, Ouranos. Lors de ces festivités, la pyramide sociale athénienne s’effondrait alors que les citoyens et les esclaves partageaient nourritures et boissons à la même table. Dans la culture romaine, qui fit plusieurs emprunts à ses voisins helléniques, plusieurs cultes et fêtes rendaient grâce aux récoltes ou encore, avaient lieu dans le but de d’évacuer le mauvais œil sur celles à venir.

Plus à l’est, dans le sous-continent indien, des célébrations honorant les récoltes existent aussi. À l’image des diverses croyances, courants et rites de l’hindouisme et de la religiosité indienne, les fêtes de la récolte en Inde sont multiples et très anciennes. Par exemple, dans le sud de l’Inde on célèbre l’Onam lorsque les récoltes de riz prennent fin. Au nord de l’Inde, les Sikhs célèbrent Vaisakhi pour souligner les moissons. Certaines de ces fêtes sont même antérieures à l’hindouisme tel qu’il est pratiqué actuellement.

Ces fêtes, considérées comme des célébrations païennes par l’Église catholique et certains courants protestants, ont inévitablement intégré le culte chrétien en Europe. Fort probablement déjà l’objet de réjouissances chez les peuples celtiques avant l’arrivée du christianisme sur le vieux continent, les récoltes étaient célébrées par l’Église lors de la fête de Saint-Martin, qui avait lieu autour du 11 novembre. Lors de cette journée, on remerciait Dieu pour ce que la terre nous offrait.

Fêter les récoltes aux Amériques

Au sortir du Moyen Âge, l’Europe explore les mers et s’installent entres autre aux Amériques. Entre le 16e et le 17e siècle, des Européens célébreront pour la première fois l’Action de grâce dans le nouveau monde. S’agit-il de colons français installés en Floride en 1564 ou encore des passagers du Mayflower débarquant à Plymouth en 1620? Si l’Action de grâce est célébrée une première fois en Amérique par l’un de ces deux groupes, des célébrations rendant grâce aux récoltes avaient déjà lieu avant l’arrivée des Anglais et des Français dans les territoires actuels des États-Unis et du Canada. En effet, cette période de l’année était, comme ailleurs dans le monde et dans le temps, moment de réunion et de régal pour les peuples autochtones de l’Amérique du Nord. On se réunissait avant l’arrivée des grands froids et de l’isolement. D’ailleurs, le repas traditionnel nord-américain constitué de dinde, de maïs, de canneberge et de courge est inspiré ou emprunter des Premières nations.

Enfin, l’Action de grâce et les nombreuses célébrations anciennes et actuelles, qui s’y collent, sont au cœur de la condition humaine, soit du désir de survit, mais surtout, celui de partager et de se réunir. D’ailleurs, même les Nazis avaient leur Action de grâce, soit la Fête de la récolte du Reich.

 

Par Simon Martel

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