Alors que plus d’un restaurant se désole de perdre leur clientèle et des revenus réguliers, celle-ci a décidé de faire profiter les moins nantis du fromage cheddar qu’elle concocte dans la fromagerie attenante à son restaurant et dont la salle à manger s’est vidée depuis le début depuis la fermeture imposée des commerces.
C’est la crise chez les producteurs laitiers qui a fait réfléchir Mme Malo. En voyant son mari et ses fils jeter le surplus de lait qui n’allait pas être ramassé sur leur ferme laitière de Brownsburg-Chatam, elle a cherché une façon d’en faire bon usage. Forcée de fermer sa salle à manger pour n’offrir que le service à emporter durant l’actuelle crise sanitaire, elle souhaitait néanmoins se montrer solidaire de sa communauté dont les commerces devaient demeurer fermés.
«L’idée m’est alors venue de transformer le lait qui allait être jeté. J’ai donc fait une demande de lait auprès de la fédération des producteurs de lait pour en faire du cheddar, un type de fromage qui se conserve longtemps», raconte avec spontanéité Nathalie Malo.
Grosse charge de travail
À sa fromagerie, durant une semaine, l’équipe s’est activée pour produire des centaines de blocs de fromage de 200 grammes. Pas moins de 2 200 briques de cheddar ont ainsi été façonnées. Une immense charge de travail lorsque l’on sait que le bassin ne peut contenir que 1 500 litres à la fois et qu’il faut attendre une dizaine d’heures de la première à la dernière étape que représentent le caillage, l’égouttage, le moulage, l’affinage et le salage. En tout, 4 000 litres ont été nécessaires pour concevoir les 2 200 briques.
Il fallait ensuite emballer chacune des briques, les étiqueter et effectuer la livraison à destination de Moisson Laurentides, à Blainville, qui allait de son côté redistribuer les centaines de blocs de fromage cheddar à des organismes de dépannage alimentaire où bon nombre de familles et même des personnes seules ont fait une demande d’aide au cours des dernières semaines.
«On produit des briques de cheddar car ce fromage peut se conserver longtemps et peut convenir aux personnes seules», dit Mme Malo.
«Nous voulions faire un geste qui compte. C’est important d’être là car nous vivons une crise sans précédent. Nous n’avons jamais vécu une période si sombre, aussi le fromage est réconfortant. L’idée de redonner à la communauté, ça allait de soi pour moi», souligne-t-elle.
Celle-ci croit d’ailleurs que la pandémie a changé le regard des gens sur leur consommation. «Cela a pris ça pour conscientiser à puissance 1 000 les gens à la consommation locale. Là, il y a une forte demande pour les produits locaux et mes fromages. La demande a augmenté, même mon restaurant a moins de clients. Je manque de main-d’oeuvre, car certains ont peur. On offre des paniers de légumes, des pizzas et autres produits, mais [la réduction des services de restauratio], ça créé un déséquilibre et il faut s’organiser autrement. C’est une toute autre logistique. Ce n’est pas grand ici. Au début, j’étais inquiète, mais on s’adapte et on trouve des idées. Il faut changer. Je ne suis pas certaine que le monde tel qu’on l’a connu va revenir comme avant.»
Par Reine Côté
rcote@groupejcl.ca
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