chèvres dans un enclos

Photo Reine Côté - Aux prises avec une grave pénurie d’effectifs, des vétérinaires mettent les bouchées doubles pour venir en aide à des confrères et consoeurs seuls pour desservir de grands territoires.

Des efforts déployés pour résoudre la pénurie de vétérinaires

Pas plus de cinq vétérinaires spécialisés en soins de grands animaux sont disponibles pour soigner les grands animaux sur le territoire des Laurentides et de l’Outaouais.

Une pénurie, comme dans plus d’une région du Québec. L’Association des médecins vétérinaires praticiens met toutefois les bouchées doubles pour empêcher les bris de services.

Chez les vétérinaires comme chez les médecins, la perspective de travailler en région éloignée n’est pas très attractive. Et ce type de médecine vit un phénomène particulier depuis dix ans : les femmes constituent 60% des nouveaux gradués en médecine vétérinaire.

Comme celles-ci souhaitent aussi fonder une famille en parallèle à leur carrière, elles devront inévitablement prendre congé à un moment ou l’autre dans les premières années de leur pratique. Et certaines ne reviennent qu’à temps partiel, fait remarquer le Dr Jean-Yves Perrault, président de l’AMVPQ. «Ce n’est pas un problème mais une particularité. On retrouve le même phénomène en médecine humaine», affirme et insiste le Dr Perreault, qui se dit malgré tout heureux de voir de plus en plus de femmes pratiquer ce métier.

Pratique en mode solo

Mais femme ou homme vétérinaire, un fait demeure : il y a pénurie de praticiens. Et bon nombre désertent leur métier ou songent à se réorienter. Pas moins de 56 %, selon un sondage mené au cours des derniers mois par l’Ordre de médecine vétérinaire du Québec auprès de ses membres.

La situation était particulièrement alarmante dans le secteur de Mont-Laurier jusqu’à tout récemment. Au Bureau vétérinaire des Hautes-Laurentides, qui regroupait trois vétérinaires spécialisés en soins pour grands animaux, l’un a quitté son poste l’an dernier puis un autre, au courant de l’été dernier, laissant la Dre Valérie Harrison seule pour desservir tout le territoire, selon ce qu’a raconté le président de l’AMVPQ, à L’Éveil agricole.

La situation était d’autant plus critique que la clinique vétérinaire la plus proche était celle de l’Abitibi. Or, là-bas aussi les problèmes grondaient avec les départs à la retraite sans relève.

«C’est une situation qui était prévisible. Mais dans les dernières années, on a travaillé avec le MAPAQ et l’UPA pour prévenir les bris de services et essayer de trouver des solutions avec des vétérinaires en place et de donner du support aux cliniques», explique-t-il.

Bureaux satellites

Ce partenariat a été efficace. Un bureau satellite a été mis en place afin de déployer des effectifs de remplacements permettant de répondre aux besoins urgents ou pour donner un peu de répit aux vétérinaires pratiquant seuls. Ainsi en Abitibi, ce système a permis de rétablir le service en jumelant un vétérinaire remplaçant à celui qui s’était retrouvé seul en clinique pour s’occuper des grands animaux sur tout son territoire. En fait, des vétérinaires se relaient pour aller aider d’autres confrères et consoeurs, seuls praticiens dans leur coin de pays.

Le cas de la Dre Harrison est un bel exemple. Celle-ci fait partie actuellement d’un projet pilote, où l’on veut évaluer le nombre et le type d’urgences qui nécessiteront un déplacement. La Dre Harrison a ainsi été jumelée avec une clinique centrale située dans Lanaudière. Une douzaine de vétérinaires ont accepté de se relayer pour lui offrir un support, qu’il s’agisse de deux jours, d’une semaine de vacances, à partir d’une équipe de rotation d’au moins deux journées. «Et ça va bien. Ça créé une synergie professionnelle. Le gros souci est d’assurer un service de garde 24 h, sept jours sur sept, en dehors des heures d’affaires, du service de télémédecine», indique le Dr Perreault.

 Un milieu fragilisé

«Au Québec, on est la plus grosse province dont le territoire est le plus étendu avec une distribution des productions concentrées très présentes qui ont besoin d’être soutenues, même si elles ne sont pas beaucoup dans leur type de production. Y’a personne qui veut voir des animaux en péril et on sait que l’industrie laitière a un plus grand besoin de vétérinaires», souligne le Dr Perreault.

Le système satellite d’intervention d’urgence fonctionne donc à partir d’un code de priorité par numéro de 1 à 5 établissant la fragilité de la clinique déjà en place.

«Certains territoires disposent d’un seul vétérinaire, qui intervient sept jours sur sept. Et le territoire est immense, parfois 500 kilomètres. Ces secteurs sont considérés comme zones fragilisées et elles ont droit à des aides particulières. Il faut donc trouver des solutions particulières, au cas par cas, sans qu’il n’y ait de bris de services et c’est là que l’on travaille en partenariat avec le MAPAQ et l’UPA. On essaie d’être le plus efficace possible avec une gestion simple et rapide, mais ce n’est pas toujours évident», explique le président de l’AMVPQ.

Bris de services évité

«Présentement, sur tout le territoire du Québec, on a réussi à éviter le bris de services. Mais on travaille en collaboration», ajoute-t-il. Ce dernier assure que les secteurs des Laurentides et des Basses-Laurentides ne font pas encore face à un réel phénomène de pénurie, mais elles sont tout de même classées comme zones 4, en raison de l’absence de relève à venir sous peu.

Et l’ironie de la situation, c’est qu’il y a davantage de finissants que dans le passé. Aujourd’hui, on liste 96 finissants alors qu’on en comptait autour de 70 voilà 25-30 ans.

Mais la situation est encourageante car bon nombre de nouveaux étudiants se tournent vers l’option bio-alimentaire, laquelle couvre tous les animaux, même l’abattage. Depuis deux ans, 15 étudiants ont été admis dans ce programme. «Et on pense qu’il y aura plus d’étudiants qui s’enligneront dans ce secteur», note avec espoir le président de l’AMVPQ.

«La médecine vétérinaire on a un rôle à jour de plus en plus dans la sécurité publique. Avec le secteur bio alimentaire, ils ont une expertise à offrir», conclut le Dr Jean-Yves Perreault.

 

Reine Côté

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